retour vers l'école avant 1900

Courrier de M. Bourdeau, instituteur à Fenioux

adressé à l'Inspecteur d'Académie des Deux-Sèvres en juin 1902

(sources : archives départementales des Deux-Sèvres : Monographies scolaires)

 

Fenioux, le 14 juin 1902  

 

Monsieur l'inspecteur d'Académie, 

Voici les renseignements que je puis vous procurer concernant l'état de l'enseignement à diverses époques dans la commune de Fenioux. De deux vieillards, le père Pouvreau, âgé de 87 ans et le père Moquet, âgé de 86 ans, tous deux à l'esprit lucide et à la mémoire très claire, j'ai su ceci

- Le 1er Instituteur connu a été un nommé Laurent qui peu après a quitté la place de régent pour prendre une charge semblable à celle d'huissier. 

– Le 2ème Régent a été un sieur Cardinaud, puis le père du 2ème vieillard cité plus haut. 

– Moquet, du temps de la Révolution avait été maire en Busseau, son lieu de naissance, puis Receveur et commis des bois. Arrivé à Fenioux, il s'occupe de remplacer le curé absent ou chassé, pendant les temps troublés, en lisant le Dimanche, les offices religieux au presbytère. Devenu Régent, il cumule les fonctions de chantre, sacristain et barbier. 

– Les divers locaux où ces vieux maîtres exerçaient sont, à l'heure qu'il est, transformés en servitudes diverses. C'est dire qu'ils étaient défectueux sous tous les rapports. 25 ou 30 élèves fréquentaient l'école, filles et garçons 

– Le mobilier scolaire se composait de petites tables inclinées, bancs, d'un banc pour mettre en pénitence. On apprenait à lire dans le livre d'heures, la chartre, le Testament. On commençait à 7 ou 8 ans et on ne fréquentait que peu de temps. On punissait à l'aide du fouet ou du martinet. 

– Les élèves payaient 1£50 par mois pour ceux qui écrivaient, 0£75 ou 0£50 pour les autres. Ce mode de paiement était remplacé si l'on voulait, par fourniture de beurre, d'oeufs, de viande. Chaque enfant apportait l'hiver, par matin, un morceau de bois pour le chauffage de la classe et du maître.

Par un procès-verbal daté de 15 septembre 1830, le Conseil municipal reconnaît qu'un deuxième Instituteur est utile à Fenioux 

– Le sieur Moquet, étant sacristain, ne peut consacrer tous les moments à l'Instruction. A cet effet, Gouet Jean André, natif de Secondigny, muni de Brevets, par Mr le Recteur, en date du 29/9/1830, est choisi comme deuxième instituteur. Le 8 février 1834 il est indiqué au Registre, qu'un Comité de surveillance pour l'instruction primaire existe à Fenioux. Il doit se réunir à la Mairie, le 1er de chaque mois, à 10 heures du matin. Le secrétaire choisi est Mr Gouet. Le 7 mars 1834, le Maire et les membres du comité de surveillance désignent Mr Gouet pour bénéficier des fonds alloués au budget « Vu son Brevet, sa bonne conduite et sa fidélité au Roi.» 

Le 9 mai 1834 le conseil municipal vote un impôt de 354 francs 25 cents pour l’année 1835, à l’effet de solder le salaire de l’Instituteur et d’opérer des réparations aux ponts et fontaines. Par une décision du comité supérieur de Niort, en date du 5 juin 1834, Moquet Jean, Instituteur commune de Fenioux, a été ajourné à 3 mois, pour lui permettre d’acquérir les connaissances dont il avait besoin. Ce délai expiré, « le conseil du comité, considérant que cet Instituteur soumis à une nouvelle épreuve sur la lecture, l’écriture et le calcul, n’a pas montré plus de capacité que la première, ce qui constitue le cas de négligence habituelle, vu l’article « 20ème de la loi du 28 juin 1833, le condamnait à la peine de la révocation » Une lettre du même jour, le 6 septembre 1834, du Secrétaire, en fait part au Maire. Moquet dit par une note de sa main ceci « Je reconnais avoir reçu de Mr Frère, Maire de Fenioux, extrait de Registre des délibérations du comité d’instruction primaire de l’arrondissement de Niort. A Fenioux, le 10 septembre 1834. Moquet » 

Le 10 mai 1835, le conseil municipal confirme Gouet André dans ses fonctions, selon les instructions reçues du comité de surveillance de Niort, ce qui est accepté par le comité de la commune, le même jour. 

Le 8 février 1857, le conseil municipal appelé à se prononcer sur l’utilité d’une Institutrice, onze membres disent non, trois disent oui et se déclarent catégoriquement pour une laïque, avec vote d’un traitement de 150L et d’une indemnité de logement de 80L.

En 1862, le 1er septembre a lieu l’installation du premier Instituteur adjoint. En 1865, le 29 août, a lieu celle de la 1ère Institutrice laïque. En 1866, le 11 février l’installation de M. Bonneau René, au lieu et place de M. Gouet décédé. M. Bonneau est resté instituteur dans cette commune de cette époque au 1er septembre 1888, jour où votre serviteur a commencer à exercer à Fenioux. 

De cette date à maintenant, j’ai établi un Registre spécial, relatant tous les procès-verbaux d’installation d’Instituteur et Institutrice, titulaires ou adjoints. Le 6 septembre 1897, un 2ème poste d’Adjoint a été créé a Fenioux et il y a environ 24 ans, un beau groupe scolaire, défectueux seulement pour le logement des Adjoints, a été construit. 

Et cette belle commune, qui compte 1587 habitants, grâce à l’instruction, va lentement peut-être, mais sûrement vers le progrès. 

A l’élection du 27 avril dernier, le candidat Républicain a obtenu 323 voix et le monarchiste 80 ; au 2ème tour, le 1er a eu 329 voix et le 2ème 74. Pour la Gâtine, on ne peut guère désirer mieux.

Veuillez agréer Monsieur l’Inspecteur d’Académie, l’assurance de mes sentiments respectueux et bien dévoués.

Bourdeau

PS : Si besoin est, je tiens à votre disposition les extraits des principales pièces ci-dessus indiquées.

retour vers l'école avant 1900