Signification des noms de lieux de Fenioux (Deux-Sèvres)
suivi
des noms des communes voisines et autres lieux-dits
Entre parenthèses [...] la prononciation locale des toponymes lorsqu'elle est différente du français
Fenioux
Les mentions anciennes pour Fenioux sont Finiacum (vers 1090), Villa Fenils (vers 1122), Fenios (XIIe siècle), Feniosum (1299) et Fenyos (1300). Fenioux n'apparaît qu'en 1415.
Gabriel Guillemet expliquait que ce nom de lieu signifiait « lieu où pousse le foin ».
La mention la plus ancienne, Finiacum au XIe siècle, pourrait cependant nous orienter vers une autre étymologie : le suffixe –acum, d’origine gauloise, a été adopté par les gallo-romains et a servi à construire de très nombreux noms de lieux. Le toponyme était alors formé à partir du nom d’une personne auquel était ajouté le suffixe –acum, signifiant « le domaine de ». Finiacum pourrait alors se comprendre comme « le domaine de Finius » à moins qu'il ne fasse référence au latin finis ou fines dans le sens de "frontière".
Mais selon Pierre Gauthier * cette forme Finiacum, la plus ancienne, est probablement une latinisation erronée.
Selon lui, les mentions postérieures et la phonétique historique du poitevin invitent à choisir le dérivé bas-latin fenilis formé sur le latin fenum, foin.
Fenioux serait alors la forme poitevine pour fenil (lieu où est stocké le foin), comme on dit fourniou pour fournil ou comme on trouve le lieu-dit le Courtiou indiquant l’emplacement d’un courtil, nom français désignant un jardin clos.
Les
noms de lieux se terminant en –ière et en -erie
Ce sont les plus nombreux, près de la moitié des noms de lieux habités de Fenioux.
Citons
par ordre alphabétique :
La plupart de ces noms de lieux datent de l’époque féodale et correspondent à l’expansion démographique des XIIe et XIIIe siècle, époque des grands défrichements, de l’implantation des hameaux et de la construction des églises romanes (l’église de Fenioux fut aussi construite au XIIe siècle).
Comme le suffixe –acum gallo-romain, le suffixe –ière sert à former un nom de domaine à partir d’un nom de personne (ou parfois à partir d’un nom commun). La finale en -erie semble indiquer des noms de lieux de formation plus récente.
La Bernardière,
Un acte de 1484 évoque une certaine "Jehanne Lunarde" en tant que propriétaire de La Lunardière (recherche historique sur la Lunardière de Guillaume Le Du).
Les noms de famille n'apparaissent pas toujours de manière si évidente, le nom peut ne plus être porté ou les déformations au fil des siècles peuvent le rendre incompris.
La Pressonnière était autrefois appelée La Pélissonière ou La Plissonière, probablement demeure d'un sieur Pélisson ou Plisson (voir la légende du Pas Plisson rapportée par G. Guillemet). On trouve encore La Brethelière (1577) pour la Berthelière, La Juninière pour La Julinière, La Mangottière pour la Mingotière, La Chupaudière pour la Chipaudière, La Gondremière pour la Gandermière, La Chebetière pour la Cheptière et La Mignaudière (1613) ou La Minaudière pour La Miaudière.
L'Aumonerie était, avant la révolution, appelée la Mounerie où La Monnerie. Rien à voir donc avec un établissement ecclésiastique, il s'agit plus sûrement du domaine d'un sieur Mounier ou Monnier.
Pour
Linlière, les registres paroissiaux rapportent que le 10 novembre 1680
Pierre Dehanne, escuyer seigneur de Linière ou l'Elignière,
et
dame Marie-Anne Després, ont une fille Louise. On trouve aussi des
mentions Lintière
ou encore Linetière sur la carte de Cassini. On peut penser
qu'à
l'origine ce nom de lieu désignait un "endroit où on cultive le
lin".
Pour les passionnés de toponymie : hypothèses concernant la Somorière et Saumort
Lambert
et Gaillard
Ces
deux toponymes, localisant deux anciens moulins à eau, sont aussi des
noms de
famille parmi les plus portés en Deux-Sèvres aujourd’hui. Cependant, il
est
souvent difficile de savoir si c’est le nom de lieu qui a donné son nom
à
ses habitants ou si ce sont les premiers propriétaires ou occupants qui
ont
laissé leur nom à leur demeure.
Le
Bourgeasson
En
1470, un certain Jean Malmouche est sieur du Bourg-Jarrousson, fief qui
fait
alors partie de la seigneurie de
Bourgeasson est la contraction de Bourg-Jarousson, qui est toujours « le faubourg » de Fenioux. Jarousson pourrait être le nom du premier tenancier, on peut le rapprocher du mot local jharosse ou jharousse qui désigne en Poitou une sorte de légumineuse, probablement la vesce craque.
Il
existe aussi un lieu-dit nommé
Le Fougeroux [Le Fougéroux]
Le Fougeroux désigne un endroit où les fougères abondent. On connaît aussi le hameau de Fougère à Béceleuf et la commune de Saint-Maurice-la-Fougereuse dans le nord des Deux-Sèvres. Le Fougeroux était anciennement Le Faugeroux (censif de la seigneurie de la Braudière), en effet la forme poitevine pour "fougère" est faugère, on trouve par exemple La Faugère à Germond.
La Bâtie
Dans les sud-ouest, une bastide désignait une ville franche fortifiée. Dans d'autres régions le mot a évolué vers le sens d' "exploitation rurale, ferme, maison" qui pourrait s'appliquer à La Bâtie de Fenioux. Mais une autre piste est possible : une laie, un chemin forestier, dans la forêt de Secondigny proche, menait autrefois directement au lieu-dit la Bâtie, or ce chemin est nommé "chemin de l'abatie" par les forestiers. Le toponyme "La Bâtie" serait alors une mauvaise interprétation de "l'abatie" désignant un lieu d'abattage d'arbres, un endroit défriché.
photo J. Chauveau
Cezelle
On disait et écrivait autrefois Chezelle (bordries de Chezelle en 1788). Cette forme ancienne nous oriente vers un sens probable de "petite maison, petite exploitation". Chezelle c'est en effet la petite cheze, du latin casa, maison. On connaît la commune de La Chaize-le-Vicomte en Vendée mais, plus près de nous, le château de Nuchèze (cheze neuve) à Champdeniers signalait la présence d'un établissement, d'une maison nouvellement implantée..
En ancien français, chesal ou chesel nommait une métairie ou un manoir entouré de terre.
Le Magnou
Mansus désignait au Moyen-Age une exploitation agricole, une maison rurale. Ce mot latin a donné "mas" en Provence et un de ses dérivés a donné le mot français "mesnil" d'où dérivent Le Magny et Le Magnou. ll existe une dizaine de noms de lieux habités nommés Le Magnou(x) et six Le Magny en Deux-Sèvres.
paysage d'hiver près du Magnou (photo Joseph Chauveau)
Les Déserts
Ce nom de lieu (très) récent a repris le nom du terroir où s'est implantée une nouvelle maison. Les lieux nommés Le Désert ou Les Déserts désignaient des terres éloignées de tout ou d’anciens défrichements devenus des terres incultes.
Borlia [Boria]
Borlia serait la forme poitevine en -ia correspondant à borel ou borleau, nom de personne (anthropoyme) dérivé de borrel "bourre" désignant un bourrelier. Borlia, comme Lambert ou Gaillard, aurait donc pris le nom de son premier propriétaire ou tenancier. La Borlière étant quant à elle "le domaine ou les terres" d'un nommé Borleau ou Borlia.
Borlia (photo J. Chauveau)
Le
Claudis
Le Claudis, aussi écrit le Cloudis, pourrait se rattacher à « clos » ou « clous » avec le sens d’endroit clôturé, d’enclos. On retrouve cette notion d’enclos dans les noms de communes Saint-Aubin-le-Cloud (Deux-Sèvres) ou Saint-Michel-le-Cloucq (Vendée).
Brusson
Dauzat & Rostaing,
célèbres toponymistes, à propos d’un autre
Brusson (commune de
Château de Brusson ( photo J. Chauveau)
Le Dictionnaire de l’ancienne langue française de Godefroy donne à bleure le sens de « récolte de blé ».
Les
formes anciennes des autre Bleures deux-sévriennes sont
La Bloyère (1425),
Pierre Gauthier * émet l'hypothèse d'un hydronyme, c'est à dire un nom de lieu se rapportant à une rivière ou un petit cours d'eau. Deux autres "La Bleure" en Deux-Sèvres sont des moulins à eau (à Moncoutant et La Ronde). D'autre part "La Grande et La Petite Bloure" sont des rivières poitevines et il existe une racine hydronymique pré-latine Bol/Vol qu'on retrouve dans certains noms de rivière comme La Bloire où La Vologne. Il est vrai que La Bleure de Fenioux est longée par le "ruisseau de Brusson" mais ce nom de lieux garde, pour l'instant, tout son mystère.
Les Longées [Les Lonjhées]
Les Longées définit une pièce de terre plus longue que large, un terrain tout en long. C'est un mot encore commun en poitevin où le mot lonjhe est utilisé en place du français "longue". On trouve ce toponyme plus souvent écrit La ou Les Longeais, particulièrement en Vendée. Il y a un autre lieu-dit nommé Les Longées au Busseau.
Le Petit Chêne [Le Petit Châgne] (aussi appelé La Logette [La Lojhette], voir à La Loge pour ce toponyme)
L'adjectif "Grand" devant un nom de lieu désigne, le plus souvent, l'importance ou l'ancienneté du lieu par rapport à un lieu voisin affublé de l'adjectif "Petit".
Le Petit Chêne de Fenioux est proche du village nommé Le Chêne, commune de Pamplie. Ce lieu tient son nom de la présence d'un chêne remarquable, probablement par sa taille et son âge. Le propriétaire actuel raconte qu'il y a quelques années, un inconnu s'est présenté chez lui pour lui montrer une gravure sur laquelle on pouvait voir un arbre magnifique avec l'indication "Le Chêne, Pamplie". Ce chêne n'avait pas été oublié sur place puisque qu'une section de son tronc avait été coupée au moment de son abattage et gardée en souvenir.
Le Pré
Le sens de ce nom de lieu, du latin pratum, va de soi.
Au Busseau, on trouve ce toponyme au féminin : La Prée.
Le Courtiou
Le Courtiou désigne un jardin clos près d'une maison, une petite cour. Il correspond au français "courtil".
La Grande et La Petite Jarrie [La Jharrie]
L'occitan garric désignait le chêne kermès mais aussi le chêne en général ou un bois de chêne. La garrigue, mot emprunté à l’occitan, signala d'abord un lieu planté de chênes puis prit le sens de terre inculte. En Limousin ou Périgord, jarric ou jarri désigne le chêne truffier ou tout simplement le chêne, Jarrijo a d’abord désigné une chênaie rabougrie mais ce mot nord-occitan a pris ensuite le sens de terre inculte ou même de broussailles. Il se pourrait donc que les différentes Jarrige ou Jarrie aient simplement désigné des lieux embroussaillés, sans référence aussi précise à la présence du chêne.
Saint-Marc [Saint-Mar]
Saint-Marc
tient son nom d'une chapelle autrefois implantée dans ce hameau et
consacrée
à St-Marc. Une statue, encastrée dans un mur de cloture sur le chemin
d'accès
au village, serait le témoin de cette ancienne chapelle. Le corps de la
statue
daterait du XIIIe siècle. La tête, de facture très frustre,
a
été ajoutée car elle n'est pas du même style.
G. Guillemet prétend que cette statue était dénommée "St-Marc" et qu'on y venait en procession de Fenioux chaque 25 avril.
Statue de St-Marc (photo J. Chauveau)
Le Beugnonnet [Le Biunet]
Le Beugnonnet c'est "le petit Beugnon", peut-être un nom transporté dans les bagages "d'émigrants" venant du Beugnon ? (voir sens du mot Beugnon en fin de chapitre).
La Vergne et La Vergnée [La Vergnaïe] (ancien logis et moulin, La Vergnays en 1624 )
Un vergne c'est bien sûr un aulne et une vergnée une aulnaie. Le mot d'origine gauloise vergne est utilisé dans la partie sud de la France alors que le mot d'origine latine "aulne" se cantonne dans la partie nord, au-dessus d'une ligne Nantes -Mulhouse.
En breton le mot gwern signifie à la fois aulne et marécage. Les très nombreux noms de lieux dérivés de verno ne désignaient peut-être à l’origine que des endroits humides, des marais, ce qui pourrait expliquer la fréquence des toponymes formés à partir du mot vergne.
La Vergne de Fenioux était autrefois nommée La Vergne-aux-Pascaux, probablement pour la différencier de La Vergne de Béceleuf appelée La Vergne-Samoyeau puis la Vergne-Chamereau, du nom des tenanciers successifs.
Les Noues, Les Noelles (ou La Maison Neuve)
Une noue désigne un lieu humide, un fond marécageux, un étang. Ce serait un mot d'origine gauloise.
Les Noelles ont le même sens. On trouve aussi Les Noues sur la commune de la Chapelle-Thireuil.
La Maison Neuve [La Maison Nu]
Il existe plusieurs lieux-dits nommés La Maison Neuve à Fenioux : la première près du Saumort, à la limite des trois communes de Fenioux, La Chapelle-Thireuil et Le Beugnon, une seconde près de la Bonnetière et une troisième, route d'Ardin, aussi appellée Les Noelles
Le Jardin
Autrefois "Mon Jardin", désigne un lieu près du bourg où quelqun devait faire son jardin.
Le Pin
La tradition de planter un pin parasol, appelé pin pinier ou simplement pinier, à l'occasion d'un événement exceptionnel était coutumière dans une grande partie de notre région et même au-delà. En Vendée on plantait un pin parasol à la naissance du premier enfant, ou du premier fils, ailleurs ce pouvait être à l'occasion d'un mariage ou de l'élection d'un maire. C'est probablement en pays protestant, particulièrement dans le sud des Deux-Sèvres, que cette tradition était la plus ancrée. Le pin parasol, avec les cimetières familiaux, est ainsi devenu un marqueur du pays huguenot.
Il n'y a pas de pin visible actuellement à proximité de ce lieu-dit, c'est pourtant bien cet arbre qui a du lui donner son nom, mais le pin parasol ne dépasse guère les 200 ans de vie, le toponyme est bien plus ancien.
On trouve autrefois mention de La Motte du Pain, la "motte" qualifiant la butte sur laquelle est installée cette habitation.
Clairouin [Cllairouin]
On peut rapprocher ce nom de lieu d'un Fonclairouin à St-Martin-de-Bernegoue (Deux-Sèvres), de Fontclairet à Champagne-Mouton (Charente) et de la commune de Fontclaireau en Charente qui indiquent "une source, une fontaine aux eaux claires"
Les toponymes comme Clairouin (Fenioux, 79), Clairin (St-Léger-de-la-Martinière, 79), Claireau (moulin sur la Vienne à Valdivienne, 86) désigneraient donc des sources ou des cours d'eau aux eaux claires. A la fin du XVIIIe siècle Clairouin est écrit Clairoy.
Lavault [ La Vâ ]
Les différentes orthographes utilisées pour ce nom de lieu ne correspondent pas à la réalité puisqu'il s'agit de La Vau, c'est-à-dire "la vallée". Tout le monde connaît la rue de La Vau St-Jacques à Parthenay, ancien chemin de Compostelle qui part de la Porte S-Jacques et rejoint le haut de la ville par une petite vallée.
Le Châtelier [ Le Châtlâ ] (Les Chastelliers en 1505)
Les "châteliers" sont souvent d'anciennes maisons fortifiées du Moyen-Age installées sur des hauteurs (des mottes), ce qui est bien le cas du Châtelier de Fenioux qui domine la rivière "le Fenioux".
C'est à partir de 1664 qu'apparait, aux régistres paroissiaux de Fenioux, l'existence de la famille Raoul avec le titre de "Seigneur des Châteliers" (G. Guillemet).
Les Châteliers sont souvent d'anciens lieux fortifiés installés sur des lieux élevés (photo J. Chauveau)
Le Gât, Gâtine
Le Gât comme Gâtine désignent des terres en friche ou des terrains incultes ou de mauvaise qualité. En Vendée, dégâter a le sens de biner ou défricher. On oppose souvent les bonnes terres de la plaine de Niort aux terres plus ingrates de la Gâtine.
La Règle [La Reille]
La prononciation locale, La Reille, correspond à une forme populaire utilisé pour "règle" avant le XVIe siècle et qui désignait, entre autre, une "barre servant à refermer une porte". La Règle pourrait alors avoir un sens proche de La Barre (voir ci-dessous). En Deux-Sèvres, il existe des toponymes nommés La Règle à Béceleuf (La Ré en 1349 et La Reille en 1612) et à Romans (La Reulle en 1260 et La Reille en 1553). On trouve La Reille à Taizé près de Oiron (Deux-Sèvres) ainsi que dans d'autres départements.
Le Vigneau [ Le Vegnâ ]
Le
Vigneau désigne un endroit où étaient implantées des vignes. Sur un
document
de la fin du XVIIIe siècle, on peut lire Le Vigneau ou Le
Remigiou,
ce dernier terme indique un endroit couvert de ronces, du latin rumex
qui
avait aussi le sens de "dard".
La
Pouge [La Poujhe]
En Limousin une pouge désignait un chemin traçé sur une hauteur permettant d'éviter les fonds de vallée impratiquables en hiver. Un itinéraire reliant Limoges à Bordeaux était par exemple appelé la pouge feyteau (feytau en comparaison à la tuile faîtière).
La Pouge serait-elle le témoin d'un ancien chemin traçé entre les vallées du Saumort et du Fenioux ?
Pouge ayant la même racine latine, podium, que puy (qui a donne Puy-Hardy), ce nom de lieu pourrait tout simplement désigné un lieu élevé, une hauteur, une côte.
Nous en avons un autre exemple avec La Pouge, commune du Busseau, localisée entre un "sommet" de 242 mètres (près du lieu-dit Le Peu, autre forme pour Le Puy) et un autre "sommet" de 222 mètres où est implanté un haut château-d'eau visible de bien des endroits de Fenioux.
La Barre
La Barre pouvait signaler tout simplement une barrière, une clôture. Elle pouvait aussi autrefois avoir le sens d'extrémité et marquer la limite d'un territoire.
La Loge, Les Louges, La Logette
Les Louges est la forme poitevine pour Les Loges et La Logette en est un diminutif (la petite loge).
Loge est un mot d'origine germanique qui a d'abord été un terme du langage forestier signalant une hutte de branchages, une cabane. Loge a ensuite pris le sens de hangar rudimentaire pour entreposer le matériel agricole.
Relevé des domaines situés paroisse de Fenioux sujets à dîme en 1788
Signification des noms de lieux des communes limitrophes
et de quelques autres lieux-dits
Le
Beugnon
L’origine
du toponyme Le Beugnon
s’expliquerait, selon certains, par les termes latins benina
onda, qui signifieraient quelque chose comme « onde bénie,
source sacrée ».
Les
lieux habités nommés Le Beugnon dépassent la trentaine et sont
essentiellement présents en Vendée, Deux-Sèvres, Maine-et-Loire, Cher
mais on
en trouve aussi en Loire-Atlantique, Indre-et-Loire, Charente-Maritime
et, plus
loin, dans l’Yonne, la Nièvre et le Loir-et-Cher.
Les toponymes Le
Bignon
sont encore plus nombreux et se situent essentiellement dans le quart
nord-ouest
de la France (dont une commune de Loire-Atlantique).
On
trouve aussi Le Begnon à Germond en Deux-Sèvres et à Saint-Mesmin en
Vendée.
L'hypothèse Benina Onda n'est confirmée par aucune forme ancienne. On trouve Ecclesia Daubeugnon en 1300 puis Le Buignon-en-Gâtine en 1396.
Si
cette étymologie latine ne peut pas être retenue, on se consolera en
constatant que
le mot beugnon ou bignon,
peut-être d’origine gauloise, signale bien une source ou un petit
ruisseau.
Verrier
et Onillon dans leur
« Glossaire étymologique et historique des patois et des parlers
de
l'Anjou » donnent à bignon la définition
de « source d’un champ ».
En
Suisse romande bugnon s’utilisait au sens de
« source, fontaine à fleur de
terre » (selon le célèbre toponymiste Paul Lebel).
Toujours en Suisse, on trouve trace d'une famille Bugnyon (puis Bugnon)
dès 1455. Les armoiries de cette famille sont parlantes car en rapport
avec l'origine ou l'étymologie du nom : une fontaine stylisée figure
sur l'écu.
Pour
confirmer la relation entre la présence de l’eau et le mot beugnon,
nous pouvons relever de nombreux Ruisseau du Beugnon (Maine-et-Loire),
Source du
Beugnon (Côte-d’Or), Fontaine du Beugnon (Maine-et-Loire mais aussi à
Soudan
dans les Deux-Sèvres), Ruisseau du Bignon (Ille-et-Vilaine, Mayenne),
Ruisseau
de la Fontaine du Bignon (Saint-Léger-la-Martinière, Deux-Sèvres),
Fontaine
du Bignon (Sarthe), La Fontaine Bignon (Indre-et-Loire), etc.
Jacques
Duguet (Noms de lieux des Charentes, Edition Bonneton) signale encore
un point
d’eau Le Beugnon à Périgny et une source Le Bignon à Semoussac.
Le Beugnon (photo J. Chauveau)
Secondigny [Sgongné] :
Comme pour Secondigné-sur-Belle (autre commune des Deux-Sèvres), on trouve une mention Secundiniacum aux alentours de l'an 1000 qui semble indiqué un "domaine, une propriété" d'un homme gallo-romain appelé Secundinius.
le balet de l'église de Secondigny
Le Retail :
La commune du Retail (retallium en 1194) a été détachée de celle d’Allonne en 1912. Retail a souvent été rapproché du terme angevin retaillis désignant un « bois taillis » mais Le Vieux Coustumier du Poictou définit le retail comme le quart de la borderie, le quarteron étant demye borderie et la borderie demye masure. Un retail désignerait alors le plus petit échelon d’évaluation de l’étendue d’un domaine rural. Le Retail est un nom de lieu principalement présent en Vendée.
châtaigniers au Retail (photo J. Chauveau)
Pamplie :
Le nom de la commune de Pamplie (Pampelia, 1097) est généralement rapproché de celui de Pamproux et indiquerait un endroit où était autrefois cultivées des vignes. Pampre désigne la vigne ou un rameau de vigne couvert de feuilles. Jadis, à Pamproux, la vigne occupait de vastes superficies, quelques-unes sont encore exploitées sur le Côte-Belet, avec en particulier la vegne à tertous, issue d’un projet communal de restauration du vignoble
Pamplie (photo J. Chauveau)
Xaintray [Cintray] :
La prononciation locale est Cintray, le X n'est apparu qu'au XVIIIe siècle. Les formes les plus anciennes sont Cintreyum en 1169 puis Cintrai en 1561. Plusieurs communes de France ont exactement la même prononciation : Ceintrey (Meurthe-et-Moselle), Cintray (Eure et Eure-et-Loir), Cintrey (Haute-Saône). Ces différents toponymes ont été formés à partir d'un homme latin Cintrius ou Cintirius.
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Xaintray (photo J. Chauveau)
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Béceleuf [Bess'leu] :
On trouve les mentions Becelum au XIIe siècle, Beceleu vers 1255, Becelou en 1267, Becelieu en 1411 et encore Besselieu ou Besseleuf en 1515. Bès en occitan désigne le bouleau et est à l'origine de très nombreux noms de lieux dans la partie méridionale de la France : Besse-en-Chandesse, Labécède-Lauraguais, La Bessière, etc. Béceleuf pourrait se comprendre comme le lieu (leu) où poussent les bouleaux (bés).
Béceleuf (photo J. Chauveau)
Ardin :
Le nom d'Ardin (curtis Arduno in pago Pictavense) apparaît dans une des plus ancienne source écrite du Poitou : une lettre écrite en 669 par le Roi Childéric II, évêque de Poitiers ! De nombreux vestiges romains ont été découverts autour de l'actuelle église mais aussi dans la plaine entre Ardin et Coulonges-sur-l'Autize.
Le gaulois dunum a, semble-t-il, d'abord désigné une colline, puis une forteresse ou un village fortifié sur une hauteur. Ardin serait "(le village) près de (Ar) l'enceinte fortifiée (Dun)". Sur la même racine gauloise ont été formés Loudun (Vienne) ou Issoudun (Indre).
Ardin : ancien village fortifié dominant l'autize (photo J. Chauveau)
Puy-Hardy [Piardi] :
Le latin podium est à l'origine du mot Puy qui a le sens de petite hauteur, élévation de terrain. Puy-Hardy est en effet sur une hauteur dominant la vallée du Saumort. Hardy est un patronyme probablement d'origine germanique.
Puy-Hardy (photo J. Chauveau)
La Chapelle-Thireuil :
Le nom de
ce village serait emprunté au surnom d'un des ses anciens possesseurs, Tirols
de la Capella ou Tirolius de la Chapella, mentionné dans un
acte de
1140 environ.
Quelques lieux-dits des communes limitrophes :
La Folie (Le Beugnon): Il
serait tentant de rapprocher le nom de lieu La Folie du mot fou qui
désignait
autrefois le hêtre (Le Puy du Fou signifie par exemple "la colline du
hêtre") mais un lieu feuillu, une feuillée se disait foillie en
ancien français. Une feuillée, ce peut être un ensemble d'arbres
feuillus mais aussi un abri de feuillage, une baraque de branchages. La
localisation de nombreuses folies dans des lieux boisés où
défrichés
tardivement s'expliquerait par ce sens qui a pu donner d'autres
toponymes tels
que Le Fouilloux en Deux-Sèvres où la commune de Feuillade en Charente.
Les
folies peuvent aussi parfois désigner des terres ingrates
« qu'il
est fou de vouloir cultiver », mais encore des constructions de
plaisance,
souvent originales telles les Folies-Siffait au Cellier-sur-Loire en
Loire-Atlantique, labyrinthe de terrasses au-dessus de la Loire datant
du XIXe
siècle.
La Coudre, La Boule, La Rourie, Les Bourdaines (Le Beugnon) : Ces toponymes font référence au noisetier (le coudrier), au bouleau (avec lequel on fabrique "le balais de boule"), au chêne (du latin robur qui a donné le chêne rouvre ou roure) et à la bourdaine, arbuste proche du nerprun.
Tout-y-Faut (Le Beugnon) : "Tout y faut" c'est à dire "tout lui manque". Ce nom de lieu indique la pauvreté d'une terre ou d'une propriété. D'autres toponymes, formés de la même façon, décrivent d'une façon imagée le dénuement ou l'ingratitude des terres : Gâte-Bourse à Ardin, Gâtevin, terroir entre Béceleuf et Epannes, Racle-Bourse à Germond, Pain-Perdu à Coulonges-sur-l'Autize ou encore Baillemalaise à Niort et Baille-Peine à Benet (Vendée) dans le sens de "donne de la peine" ou Crève-Cul, terroir à Sciecq. Citons aussi Malassis (mal situé) aux Alleuds, Malgagne terroir à Arcais, Moque-Panier (qui rend le panier inutile ?) à Mauzé-Thouarsais, Moque-Souris (absence de récolte, de grain pour un moulin) à La Chapelle Saint-Etienne ou Crève-Souris, Gâte-Pic et Risquetout en Vendée.
Froidefond (Le Beugnon) : [Frèdfond] Frigida fontana au XIIe siècle indique une source, une fontaine aux eaux froides.
Le Plessis (Le Beugnon) : [Le Pllessis] L'ancien mot français plessis désignait un enclos entouré de haies plessées c’est-à-dire construite de branches entrelacées.
Les Eaux (Secondigny) : Ce lieu-dit situé à la sortie de la forêt de Secondigny en direction de Fenioux est maintenant en ruine. Son orthographe actuelle semble découler d'une mauvaise interprétation de l'ancien français ort ou hort, désignant un jardin. En effet, en 1638, ce lieu est nommé Village des Ors. Le latin hortus, "jardin", a donné le mot "horticole" mais aussi "ortolan", oiseau du jardin.
Le Marchais (Secondigny) : On le trouve aussi écrit "Le Marché" sur une pancarte. Ce toponyme n'a rien à voir avec un homme politique (!), ni avec l'ancien emplacement d'un marché. C'est plus simplement une forme ancienne pour un endroit marécageux, un marais ou tout simplement une mare.
Les Essards (Secondigny) : Pour obtenir une terre cultivable on coupe d’abord le bois pour le chauffage ou la construction puis on arrache les souches et enfin on brûle sur place les broussailles, les bois morts, c’est ce qu’on appelle l’essartage. Les essarts sont des terres défrichées, des abattis d’arbres, ils pourront désigner ensuite de simples bois taillis.
La
Coussaye (Le Retail) : [La Coussaille] En Poitou le houx était nommé cous ou coussat.
Une coussère désignait le houx mais aussi un lieu planté de
houx plus
souvent nommé coussatère ou coussaie.
La Coussaie c'est donc une houssaie, lieu planté de houe.
Le Terrier Piscault (Le Retail) : [Le Tra Piscault] En français un terrier est un trou creusé dans la terre par un animal sauvage mais le mot terrier, trà en Poitou, peut aussi avoir le même sens que tertre qui désigne une petite hauteur isolée, une butte. C'est bien le cas pour Le Terrier Piscault, lieu-dit perché au-dessus de l'étang de Brusson et d'où la vue porte loin.
Le Terrier Piscault, altitude 180 mètres (photo J. Chauveau)
Pied
Mollet (Xaintray) : [Pé Mollet] Un curieux toponyme dons le
sens s'éclaire si l'on se
rappelle que Puy (dans le sens de hauteur) a pris en Poitou la forme de
Peu
ou Pé, or "pied" se dit aussi pé en poitevin. Puy se
prononcait donc localement Pé et, mal compris, a été retranscrit Pied
auquel
on a rajouté Mollet avec une orthographe rappelant aussi une partie de
la
jambe alors que le mot désigne un endroit humide, un terrain
marécageux,
dérivé du latin mollis, "mou". Une mention de 1715 indique Puymollet.
Le Treuil
(La Chapelle-Thireuil) : Les treuils sont des pressoirs qui étaient
souvent
installés directement dans la vigne et c'est le pressoir qui a donné
son nom
au lieu ensuite habité.
Patrouillet
(La Chapelle-Thireuil) : En Poitou patrouiller (parfois pitrouiller)
c'est patauger dans la boue, marcher dans l'eau, jouer avec de l'eau
pour des
enfants. Une patroille ou patrouille désigne un
bourbier, un
endroit boueux. Patrouillet est un ancien moulin où les endroits boueux
ne
devaient pas manquer l'hiver en particulier à proximité du passage à
gué du
Saumort.
Je
remercie Pierre Gauthier (auteur de "Noms de lieux du Poitou"
éditions Bonneton) pour la relecture de ce texte sur les noms de lieux
de
Fenioux et de ses environs et pour les éléments qu'il a apportés sur
certains
toponymes obscurs comme Borlia ou La Bleure.
J.Chauveau
/ novembre 2007